Piero Crommelynck et la gravure I Hommage à Picasso

 

Piero Crommelynck est né en Italie en 1934. Son père, le célèbre dramaturge Fernand Crommelynck, auteur du Cocu magnifique que Picasso illustra en 1966, l’encouragera, ainsi que ses frères aînés Milan et Aldo, à pratiquer dès l’enfance le dessin. C’est sans doute la raison pour laquelle, à 17 ans, il commence avec ses frères, l’apprentissage de la gravure dans le mythique atelier de Roger Lacourière. Ce célèbre atelier situé à Montmartre, avait déjà accueilli les plus grands noms de la gravure, d’André Masson à Matisse, en passant par Léger et Braque. C’est là que, Piero Crommelynck, fasciné par Picasso qu’il observe travailler, trouve sa voie.

 

En 1956, les frères Crommelynck ouvrent leur propre atelier à Paris que de nombreux artistes fréquentent : Matisse, Masson, Giacometti, Marino Marini, Arp, Villon, Tal Coat, Zao Wou-ki, Hartung, Magnelli, Miró, mais aussi Michaux, Le Corbusier et Delvaux.

 

Au printemps 1963, Piero comprend que Picasso, parti s’installer dans le sud de la France, ne reviendra plus faire de la gravure à Paris. Les frères Crommelynck décident alors d’ouvrir un second atelier dans le Midi, dans une ancienne boulangerie à Mougins, pour suivre l’artiste espagnol.

 

En dix ans, Picasso y réalisera plus de 750 gravures, jusqu’à sa mort en 1973. La complicité entre Picasso et Piero fut intense et fertile. De cette relation allait naître une amitié indéfectible. Et sans jamais l’avoir voulu ni même vraiment réalisé, Piero fut l’un des rares modèle masculin auquel s’attacha Pablo Picasso, et dont il fit le plus de portraits (près de 150 présentations, toutes techniques confondues). Une relation d’exception les unit pendant plus de dix ans.

 

À la mort du peintre, Piero et son frère se consacrent entièrement à l’atelier de Paris. De nouveaux artistes anglo-saxons attirés par ce lieu devenu mythique à son tour viennent y travailler : Jim Dine, Jasper Johns, Alex Katz, David Hockney, Richard Hamilton…

 

En 1985, les deux frères décident de travailler chacun de leur côté. Piero poursuit l’aventure avec une nouvelle génération d’artistes, dont Sam Szafran, Pierre Alechinsky, Jean-Michel Alberola, Gérard Titus-Carmel, Louise Bourgeois, Jean Le Gac, Jean-Michel Meurice, Jean-Pierre Pincemin, Not Vital, Claude Viallat… 

 

Après la Seconde Guerre mondiale, le nom de Picasso devient définitivement synonyme du génie artistique moderne. Cette reconnaissance publique survient au moment où l’art contemporain renoue avec un « avant-gardisme » dont les valeurs, incarnées par Marcel Duchamp, contredisent la subjectivité flamboyante, la notoriété médiatique et le succès commercial de Pablo Picasso. 

 

En 1971, à l’occasion des célébrations entourant les quatre-vingt-dix ans de Picasso, le critique autrichien Wieland Schmied, avec la complicité du marchand d’art Daniel-Henry Kahnweiler, supervise la publication d’un portfolio de lithographies, de sérigraphies, d’eaux-fortes et d’aquatintes de plus de cinquante artistes issus des courants artistiques les plus variés, rendant hommage au peintre espagnol. Compagnons de route historiques, avant-gardistes, réalistes et abstraits, pop artistes et minimalistes, célèbrent la vitalité, la liberté créatrice qui se confondent avec le nom de Picasso.